En une soixantaine d’années, l’agriculture bio est progressivement passée d’une position marginale à une question centrale de société. C’est la démarche la plus aboutie pour la protection de l’environnement, de la biodiversité et du bien-être animal, ce qui lui confère un statut particulier et des bases solides pour l’avenir.
Rassemblés dans une association, les pionniers de l’agriculture biologique l’ont définie comme « la synthèse qui réunit dans un même objectif la recherche de la fertilité de la terre et la santé de l’animal et de l’homme ». A cette fin, des techniques ont été développées, en particulier l’utilisation du compost.
En France, des personnalités d’avant-garde ont joué un rôle majeur. Raoul Lemaire a créé à partir de 1931 la première filière bio en France (de la fertilisation des sols avec l’emploi du lithothamne à la fabrication de farines et pains en passant par la multiplication de blés à haute valeur boulangère). A partir de 1964, Raoul Lemaire a fait équipe avec Jean Boucher. Celui-ci fut directeur des services de la protection des végétaux de Loire-Atlantique, et a créé en 1958 le premier Groupement de l’agriculture biologique (GAB) de l’Ouest et en juin 1961 l’Association française d’agriculture biologique (Afab).
En 1969, la première foire aux produits biologiques eut lieu à Saint-Maixent-l’Ecole, dans les Deux-Sèvres. En 1970, pour la première fois, l’agriculture biologique est présente au salon de l’agriculture à Paris, Porte de Versailles. La première boucherie bio fut ouverte à Niort la même année.
Il est essentiel de garder en mémoire que l’agriculture biologique s’est développée sous la double impulsion de producteurs (paysans et transformateurs) et de consommateurs, médecins, nutritionnistes.
Les principaux courants se sont initialement développés dans l’Est de la France autour de la biodynamie, dans l’Ouest avec la méthode Lemaire-Boucher et dans le Sud avec Nature et Progrès. Outre Demeter, certains d’entre eux étaient plus spécialement reliés à Bio Suisse, d’autres à la Soil Association au Royaume-Uni. Dans tous les cas, il s’agissait de développer des approches de pointe pour le travail du sol en harmonie avec la nature ainsi qu’un projet de société avec une alimentation de qualité et le maintien d’une agriculture paysanne. Les courants reflétaient des différences de sensibilités, de priorités ainsi que d’options techniques parfois.
A la fin des années 70, une vingtaine de cahiers des charges existaient lorsque les pouvoirs publics ont reconnu l’existence d’une « agriculture n’utilisant pas de produits chimiques, ni pesticides de synthèse » dans le cadre de la loi d’orientation agricole de 1980. En mars 1985, cette agriculture alternative a été officiellement baptisée agriculture biologique. 1985 fut aussi l’année de naissance du logo AB, expression de la volonté de fédérer, et outil pour aller plus loin ensemble avec une démarche de plus en plus visible pour les consommateurs. Le mouvement s’est poursuivi vers toujours plus d’harmonisation et de transparence pour les consommateurs avec l’adoption d’une réglementation européenne en plusieurs étapes depuis 1991.
Les organismes professionnels de défense des producteurs bio (Fnab) ou des transformateurs-distributeurs (Synabio) ont vu le jour à la fin des années 70 grâce à l’énergie des paysans et entreprises pionniers de la bio, soucieux de rassembler pour renforcer.
Depuis l’origine, l’ambition a été de bien nourrir l’humanité en nourrissant bien la terre. Les acteurs se sont organisés pour diffuser les connaissances, obtenir la nécessaire reconnaissance publique, structurer les filières avec notamment la conclusion de contrats.
Quelques entreprises dites « historiques » sont engagées dans la bio depuis cinquante ans et plus. En 2013, la première coopérative bio de producteurs fêtera ses trente ans. Ces anniversaires témoignent de l’esprit d’entreprise des pionniers de la bio qui se sont toujours efforcés de développer l’agriculture biologique pour le bien de l’humanité et non pas selon une logique de « niche ».